Histoire

Histoire de Saint-Chrysostome

Toponyme : Saint-Chrysostome

Type d’entité : Municipalité

Gentilé : Chrysostomien, Chrysostomienne (1986)

Le régime seigneurial

Bien avant de devenir la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome en 1838, ce territoire fait partie intégrante de la Seigneurie de Beauharnois. Le système seigneurial d’alors possède ses règles propres et elles sont fort différentes de celles que nous connaissons sous le régime parlementaire actuel. Pour constater le chemin parcouru et pour mieux saisir l’évolution de ce coin de terre, jetons un coup d’œil à ce qu’était notre région avant l’arrivée des premiers colons, nos ancêtres.

S’il existe peu de renseignements sur l’état de la Seigneurie de Beauharnois avant son érection en 1729, on peut tout de même dire que les années 1000-1600 se caractérisent par ce que les historiens appellent « l’Héritage d’Adam ». Cette expression signifie le partage que veulent faire les nations de l’Europe occidentale au XVIe siècle du gros morceau de terre presque vierge qu’est le continent américain. À cette période, les Vikings cherchent la route du Nord et les nations européennes occidentales recherchent un passage vers l’Asie. Finalement au XVIe siècle, ce sont les Français qui viennent s’installer en Amérique du Nord.

La première activité des nouveaux arrivants vise à trouver des richesses minérales. Mais ce n’est que durant les années 1600 et 1663, après la rencontre avec les Amérindiens et les installations des colons, que ce territoire appelé Nouvelle-France devient finalement une colonie pourvoyeuse de matières premières pour la mère-patrie. En 1663, Louis XIV instaure en Nouvelle-France un gouvernement royal qui recrée partout, pratiquement au même moment, des juridictions et des organismes semblables à ceux de la France. Au sommet de cette structure administrative très hiérarchisée, le Roi se réserve toutes décisions et responsabilités. Sous ses ordres, l’appareil administratif de la Nouvelle-France se compose d’un Gouverneur et d’un Intendant qui possèdent l’autorité sur tout, à l’exception de la vie spirituelle. Ils ont sous leurs ordres une armée de notables et de fonctionnaires.

En Nouvelle-France, durant le régime français, le gouvernement cède de grandes étendues de terres incultes qui prennent le nom de Seigneuries. Ces terres sont offertes à des individus influents qui, grâce à leur fortune ou à leur origine, parfois aussi à cause de services rendus à la patrie, se sont mérités les faveurs du roi. Ces territoires sont par contre donnés à la condition expresse qu’ils soient colonisés. La Seigneurie de Beauharnois, qui fût un domaine royal, tire son origine de ce système juridico-politique du régime français.)

La Seigneurie de Beauharnois

Le 12 avril 1729, le Roi de France, Louis XIV, concède au Marquis Charles de Beauharnois, Gouverneur de la Nouvelle-France (1726-1747), ainsi qu’à son frère Claude, qui sont tous deux des fils naturels de Louis XIV, une concession du nom de Villechauve ou Seigneurie de Beauharnois.
Cette étendue de terre, de forme carrée, la troisième en importance sur le plan de la superficie, fait six lieues de front par six lieues de profondeur, ou 18 milles de long par 18 milles de large, ou 324 milles carrés. Ce territoire s’étend depuis les limites de Maple-Grove jusqu’à Saint-Stanislas-de-Kostka à partir du fleuve Saint-Laurent jusqu’à Hemmingford.

Cette concession du Roi de France, Louis XIV, au marquis Charles de Beauharnois, se fait aux conditions ordinaires de « foi et hommage ». Sur ce territoire, le marquis possède des droits : la taille de bois pour les vaisseaux royaux, ouvrir les chemins nécessaires pour l’utilité publique, laisser libre cours aux pêcheurs qui veulent ériger des grèves, une liberté d’occupation pour des fins militaires et il est obligé de faire connaître les mines et minéraux du terrain. Sous réserves de leurs droits, Les Seigneurs de Beauharnois ont aussi haute, moyenne et basse justice, droits de chasse et pêche et autres droits seigneuriaux, sans aucune indemnité. Nous sommes donc en présence du type ou mode de concession de terres du régime français qui se nomme « tenure seigneuriale ».

Le 14 juin 1750, le Roi de France, Louis XV, fait un nouvel acte de concession du même territoire, dans les mêmes termes et conditions, en faveur du Lieutenant Vaisseau François de Beauharnois, fils de Claude et neveu de l’ancien Gouverneur. Il est aussi chevalier et Marquis de Beauharnois. L’héritage lui appartient ainsi qu’à ses héritiers. La raison de ce nouvel acte de concession est : « Que lui (le Roi) désire favoriser le désir, que le Marquis a formulé, d’y implanter une grosse colonie ».

Ces derniers seigneurs font quelques concessions de terres à des colons ou censitaires, qui en contrepartie, s’engagent à moudre leur grain au moulin dans la Seigneurie de Beauharnois, s’il y en a un (le premier moulin dans la Seigneurie de Beauharnois fut construit au début du XIXe siècle). Ils doivent « souffrir » tous les chemins que les Seigneurs jugent à propos de faire pour l’utilité publique. Ces derniers laissent aux Seigneurs le « droit de prendre le bois pour construire et entretenir les bâtiments seigneuriaux, moulins et autres établissements sans rien payer ». De plus, ils s’obligent à tous les travaux ordonnés par le Roi et ils n’ont pas le droit de vendre, d’hypothéquer ou d’aliéner les concessions faites par les Seigneurs sans les avertir préalablement.

À cette époque, des guerres coloniales menées par les pays d’Europe ont cours dans le monde et marquent profondément l’histoire du Canada et ne manquent pas d’influencer ce qui deviendra plus tard Saint-Jean-Chrysostome.

De Beauharnois à Annfield

Après quatre années de combats entre la France et la Grande-Bretagne, le traité de Paris est signé le 10 février 1763. La France cède le Canada et ses dépendances à la Grande-Bretagne. Désormais, le Canada, est une colonie britannique.
Le 7 juin 1763, François de Beauharnois, vend la Seigneurie à Michel Chartier, Marquis de Lotbinière et Vaudreuil, pour la somme de 24 000 livres.
Jusqu’à présent, et ce malgré « les obligations des Seigneurs envers leurs censitaires, aucun moulin à farine ou à bois n’est construit sur la Seigneurie. La vente du bois s’avère plus profitable que la concession des terres aux colons ». Le marquis de Lotbinière prend connaissance de l’état peu développé de la Seigneurie comme ceci :
« Il n’a aussi rien fait vers l’amélioration de la propriété dans son état naturel, malgré les quelques colons qui ont traversé de l’Île Perrôt et qui ont colonisé les rives du lac entre les rapides et où Beauharnois est bâti, il n’y a pas de signe de défrichement sur les 324 milles carrés. »
Le 30 juillet 1795, Michel Chartier de Lotbinière vend la Seigneurie à Alexandre Ellice, négociant anglais, membre d’une puissante maison de commerces de Londres, pour 9 000 livres, 36 000 piastres d’Espagne. « Cette concession est absolue, c’est-à-dire qu’elle inclut les 24 arpents de front cédés au Sieur d’Allainville. L’acte de vente stipule que l’acquéreur doit donner des titres de propriété aux colons déjà installés ». Le nouveau propriétaire prend des mesures pour s’occuper du développement économique et démographique de son domaine. De fait, un agent des terres, Francis Winter, un américain et un arpenteur, William Waller, font un plan général de la Seigneurie.
Ce travail d’arpentage est terminé durant l’été 1800. Le domaine est réparti en sections. Chacune d’elles reçoit le nom d’un membre de la famille Ellice. C’est à ce moment que la Seigneurie de Beauharnois change de nom pour Annfield en l’honneur de Madame Ellice.

La période Ellice

L’année 1804 est marquée par le décès d’Alexander Ellice. Sous sa gouverne, la Seigneurie est divisée en sections bien cadastrées, un moulin à farine est construit à Beauharnois, mais peu de défrichement et de colonisation sont entrepris.

Georges Ellice, le fils aîné d’Alexander, hérite de la Seigneurie. Mais un jour, celui-ci s’embarque pour l’Amérique du Sud et il n’en revient jamais.

Robert Ellice, un autre fils d’Alexander, hérite à son tour de la Seigneurie en 1817, mais il ne s’en préoccupe que très peu. Durant la même année, Édouard Ellice, également fils d’Alexander, devient héritier, et pour la Seigneurie c’est le début d’une période de prospérité.

C’est d’ailleurs à cette époque, vers les années 1820-1821 qu’arrive James Duncan, un des premiers colons connu à venir s’installer sur la Rivière des Anglais, dans un coin de terre nommé aujourd’hui Saint-Chrysostome.

Il y construit un moulin à scie, et ce, sans le consentement du propriétaire de la Seigneurie. Une véritable guerre épique s’en suit entre James Duncan et Édouard Ellice, et malgré de nombreuses interdictions de la part du Seigneur envers M. Duncan, ce dernier n’en continue pas moins à exploiter son moulin à scie.

1838 est la date de fondation de la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome de Russelltown. On y construit la première chapelle qui est inaugurée peu de temps après par un baptême et un mariage. On ouvre aussi les premiers registres de la paroisse.

Mais tout autour l’histoire poursuit sa bousculade. En 1838, il y a insurrection et soulèvement des Patriotes. On suspend la constitution. Édouard Ellice, qui séjourne au manoir de Beauharnois, est fait prisonnier par les Patriotes. Quand le calme revient, il retourne en Angleterre et en 1839, il vend la Seigneurie d’Annfield, à un banquier londonien du nom de Scott. Ce dernier engage comme agent des terres Lewis Lyman, un résidant de Montréal.

Au cours de l’année 1840, la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome est détachée de Sainte-Martine. Elle comprend une partie de la Seigneurie de Beauharnois et du Canton d’Hemmingford.

Le banquier Scott revend la Seigneurie vers 1844, à la compagnie London Land pour la somme de 750 000 $. Sur cette somme, il revient quelques 150 000 $ à Édouard Ellice qui est élu directeur de la Seigneurie. Un agent des terres, Édouard Colville, d’une importante maison de commerce écossaise, est embauché. Puis en 1851, à cause de la mauvaise administration de cet agent, (Colville), la Seigneurie est rétrocédée à la famille Ellice.

En 1854, la tenure seigneuriale est abolie au Canada et en 1855, la législature passe l’Acte des Municipalités et chemins du Bas-Canada. Cet acte stipule, entre autres, que les chemins de front et les montées dans les seigneuries doivent être ouverts pour le passage en voiture, et que l’entretien de ceux-ci est sous la responsabilité des municipalités. On prépare alors un cadastre de toutes les seigneuries d’Annfield » (Beauharnois) qui compte quelques 3 354 lots d’une valeur de 402 834 $ selon le rapport du commissaire Henry Jadah datant du 1er décembre 1860.

Saint-Jean-Chrysostome de Russeltown

La municipalité de Saint-Jean-Chrysostome de Russeltown est créée officiellement le 19 juillet 1855. Ce jour-là se tient, à l’Hôtel Alexis Gibeau, le premier conseil municipal. Il se compose du maire de l’époque Nelson Manning, et de six conseillers : Vital Baillargeon, William Power, Euzèbe Gibeau, Vital Lefebvre, Georges Hart et Josiah Black.

Les sept hommes prononcent ce jour-là, avant la séance du conseil, une prière qui maintes fois répétée par la suite, à la même occasion.

 » Ô Dieu tout-puissant et éternel de qui vient tout pouvoir et procède tout sagesse, par qui vient tout pouvoir et procède toute sagesse, par qui les Rois règnent et font les lois justes, nous voici rassemblés en votre présence, pour obtenir le bien et la prospérité de notre paroisse.

Accordez-nous, nous vous en supplions, Dieu de miséricorde, d’observer dans nos délibérations, les principes de la charité, de ne désirer que ce qui est conforme à votre volonté, de rechercher le bien avec prudence, et de l’accomplir parfaitement pour l’honneur de notre paroisse et de ses concitoyens. Ainsi soit-il!  »

Comme on peut le constater, le roi est encore très présent au début de Saint-Jean-Chrysostome de Russeltown. En fait, malgré la création de la municipalité, ce territoire fait toujours partie des terrains appartenant à la famille Ellice.

Le 8 décembre 1866, Édouard Ellice, vend la Seigneurie d’Annfield à la Montreal Investment Association. Puis en janvier 1882, John Sullivan, arpenteur juré, refait le cadastre de la seigneurie. Les numéros des lots seigneuriaux disparaissent pour laisser la place à l’implantation d’un nouveau système de cadastrage, qui est toujours en vigueur aujourd’hui.

Le 24 septembre 1880, la Montreal Investment Trust fait finalement l’acquisition de la Seigneurie pour le montant de 240 000 $. En 1940, le Gouvernement du Québec abolit les rentes seigneuriales. Jusqu’à cette date, rentes seigneuriales sont payées à la Montreal Investment Trust. Les Rentes seigneuriales sont éteintes ou rachetées par les colons en vingt annuités (paiement annuel pendant vingt ans du remboursement du capital et des intérêts).

*Pour ceux et celles qui désire connaître la liste partielle des noms des premiers colons venus s’installer à Saint-Jean-Chrysostome, vous pouvez le faire en consultant le livre du 150e anniversaire de Saint-Jean-Chrysostome.

La nouvelle Municipalité de Saint-Chrysostome a été créée le 29 septembre 1999. Elle est issue du regroupement de la Municipalité du Village de Saint-Chrysostome et de la Municipalité de la Paroisse Saint-Jean-Chrysostome. En 2016, elle compte 2 621 habitants.

La municipalité possède un important noyau villageois, des petits hameaux nommés Aubrey et Russelltown flatts.

Les armoiries de la municipalité représentent trois gerbes de blé démontrant l’évolution constante de la municipalité avec la devise exprimant les qualités prédominantes des pionniers-fondateurs de la municipalité. La roue à aubes symbolise le moulin du premier arrivant, M. James Duncan vers les années 1820-1821 où il y a construit un moulin a scie en bordure de la Rivière des Anglais. La magnifique église néo-gothique illustre le cœur de Saint-Chrysostome. Les trois nationalités fondatrices sont illustrées par leur symbole respectif : le chardon pour les Écossais, la fleur de lys pour les Français et le trèfle pour les Irlandais.

Paroisse Saint-Jean-Chrysostome

Il est à noter que cette municipalité n’existe plus depuis le 29 septembre 1999. En effet, à cette date, la municipalité de la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome et la municipalité du village de Saint-Chrysostome se regroupaient pour constituer la nouvelle municipalité de Saint-Chrysostome. Le texte qui suit est celui qui avait été rédigé pour décrire l’ancienne municipalité de la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome. Située dans la partie est de la MRC du Haut-Saint-Laurent entre Havelock et Très-Saint-Sacrement en Montérégie, à environ 30 km au sud de Châteauguay et à 25 km au sud de Beauharnois, cette municipalité de paroisse englobe le territoire de la municipalité du village de Saint-Chrysostome. La paroisse de Saint-Jean-Chrysostome(-de-Russelltown), créée par détachement de Sainte-Martine en 1843, a servi d’assises territoriales à la municipalité de Russelltown, érigée en 1845 et qui prendra son nom et son statut actuel en 1855. De 1851 à 1880, le bureau de poste local s’appelle également Saint-Jean-Chrysostome. Ce bureau de poste a toutefois été rebaptisé sous le nom Saint-Chrysostome à compter de cette date. L’appellation Russelltown, attribuée à la partie sud-est de la seigneurie de Beauharnois et comprenant la paroisse de Saint-Jean-Chrysostôme, suivant la tradition graphique d’alors, provient du prénom de l’un des fils du seigneur Ellice.

En effet, l’arpenteur qui procède, en 1800, à la division territoriale de la seigneurie attribue à chaque section ou rang le prénom de l’un des enfants du seigneur (Catherinestown, Russelltown…). L’appellation actuelle des lieux célèbre la gloire de Jean Chrysostome, dont le nom en grec a pour sens « bouche d’or » et témoigne de l’extraordinaire éloquence de ce prédicateur. Né vers 349 et mort en 407, cet évêque de Constantinople (398), père de l’Église d’Orient, a connu une popularité considérable, qui rejaillit en quelque sorte sur les Chrysostomiens.

Source: Noms et lieux du Québec, ouvrage de la Commission de toponymie paru en 1994 et 1996 sous la forme d’un dictionnaire illustré imprimé, et sous celle d’un cédérom réalisé par la société Micro-Intel, en 1997, à partir de ce dictionnaire.

Village Saint-Chrysostome

Il est à noter que cette municipalité n’existe plus depuis le 29 septembre 1999. En effet, à cette date, la municipalité du village de Saint-Chrysostome et la municipalité de la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome se regroupaient pour constituer la nouvelle municipalité de Saint-Chrysostome. Le texte qui suit est celui qui avait été rédigé pour décrire l’ancienne municipalité du village de Saint-Chrysostome :

Enclavée dans le territoire de la municipalité de Saint-Jean-Chrysostome en Montérégie (entre Saint-Malachie-d’Ormstown et Sainte-Clotilde-de-Châteauguay) dont elle tire en quelque sorte son existence, la municipalité du village de Saint-Chrysostome voyait officiellement le jour en 1902, coiffée de l’inévitable accent circonflexe sur le second o (Saint-Chrysostôme), dans le texte même de la Gazette officielle, usage qui a perduré longtemps et que l’on peut encore constater de nos jours. Celle-ci tire son appellation du nom de la paroisse de Saint-Jean-Chrysostome(-de-Russelltown), – dénomination tirée du prénom de l’un des enfants du seigneur Ellice, propriétaire de la seigneurie de Beauharnois –, détachée de Sainte-Martine en 1843. Saint Jean Chrysostome (vers 349-407), prêtre d’Antioche, nommé patriarche de Constantinople en 398, demeure célèbre par son éloquence, le grec chrysostomos ayant pour signification « bouche d’or ». Grand défenseur de l’Église catholique, monseigneur Bourget aurait opté pour le patronage de ce saint afin de sauvegarder la foi menacée par la forte présence protestante locale. On a également retenu Saint-Chrysostome comme dénomination du bureau de poste de l’endroit à partir de 1880. Les premiers Chrysostomiens arrivent dans ce coin de pays en 1828 et s’installent à moins de 10 km de la frontière américaine, au sud, entre Havelock et Très-Saint-Sacrement.